Lycée du Haut-Barr

- 67700 Saverne -

 
Mercredi 3 janvier 2021, les élèves de seconde suivant l’option Science et Laboratoire ont eu l’occasion de rencontrer le docteur Raul, médecin légiste et directeur de l’institut médico-légal de Strasbourg. Depuis le début de l’année, ces élèves de seconde travaillent sur le thème « investigation policière » et mènent à bien des expériences permettant d’analyser différents indices trouvés sur une scène de crime. Leur rencontre avec le docteur Raul leur a permis d’avoir une vision différente d’une enquête policière, et de découvrir les métiers au sein d’un institut médico-légal. 

Le docteur Raul a commencé par nous expliquer son métier et celui des scientifiques avec lesquels il travaille de façon très proche.
 
« Ce n’est pas comme ce que l’on peut voir dans les films et séries américaines » répète le docteur Raul. Il a démonté les clichés et les mythes des séries télévisées (NCIS, BONES) sur le métier de médecin légiste. Ce dernier n’intervient qu’à la demande d’un procureur, ou de la police. Il travaille en étroite collaboration avec les enquêteurs, à qui il va transmettre ses comptes-rendus. Comme un médecin « classique », le médecin légiste va étudier les corps (cadavres ou personnes vivantes mais blessées), afin de déterminer ce qui a causé les blessures de la victime. Le médecin légiste a alors deux lieux de travail : il est bien évidemment dans son laboratoire, à Strasbourg ; mais il est aussi directement sur le terrain, sur la scène du crime. « On peut m’appeler le soir à six heures, pour une intervention à Sarreguemines, et je ne rentre alors qu’à trois heures du matin » ajoute le docteur Raul. Vous l’avez bien compris, le métier de médecin légiste est un métier d’action. 
Dans son laboratoire, à Strasbourg, il va mener des études sur les corps. S’il s’agit de personnes vivantes, le docteur Raul va réaliser des comptes-rendus de blessures (par exemple après une bagarre). Mais s’il s’agit de cadavres, le médecin va réaliser des autopsies pour déterminer la cause de la mort. Si la mort est causée par une arme à feu ou une arme blanche, le médecin légiste le verra assez rapidement. Dans le cas d’un empoisonnement, d’une overdose, d’une noyade, ou tout simplement d’une mort naturelle, la cause de la mort est plus compliquée à déterminer. C’est alors qu’interviennent d’autres scientifiques. 
Le toxicologue va déterminer si une substance chimique (liquides ou gaz) peut être à l’origine du décès ; ainsi, pour une personne décédée dans un incendie, on retrouvera du monoxyde de carbone. Il peut aussi chercher des poisons. Lorsqu’une personne meurt, le sang dans son corps ne circule plus, et la substance chimique non plus, ce qui permet de trouver des substances même plusieurs jours après la mort. A l’inverse, dans une situation de soumission chimique où la personne est toujours vivante, le produit se dégrade. Dans ce cas, il est possible d’analyser le bulbe des cheveux et on peut voir si une personne a pris des produits chimiques, si elle en prenait déjà avant l’agression…
L’anthropologue est le scientifique qui étudie le squelette des victimes, afin de déterminer son âge, son sexe… Il intervient par exemple, lorsqu’un squelette est retrouvé, mais qu’on ne sait pas s’il s’agit d’un meurtre, ou d’un squelette historique.
Il y a également l’anatomopathologiste. Ce dernier étudie les tissus et cellules d’un individu. 
Il existe encore d’autres spécialistes, tels que les biologistes, qui s’occupent des prélèvements d’ADN, les entomologistes, qui en étudiant les insectes déterminent l’intervalle post-mortem, c’est-à-dire le temps qui s’est écoulé entre la mort et la découverte des victimes.
Dans notre région, le taux d’élucidation des enquêtes est presque de 100%. Mais pour résoudre ces enquêtes, les experts et les médecins légistes utilisent différentes techniques afin de trouver des preuves. En médecine légale, il y a deux principes fondamentaux : le « principe d’échange de Locard » qui dit que « lorsque deux corps entrent en contact l’un avec l’autre, il y a nécessairement un transfert entre ceux-ci. », le second est le « principe d’individualité/d’identification de Kirk » qui indique qu’« une trace est l’indicateur d’une source et d’une action ».
Lors de la venue des enquêteurs et des médecins légistes sur une scène de crime, il faut en premier lieu « fixer » la scène, c’est-à-dire baliser la zone pour éviter tout contact extérieur. Il est impossible d’entrer dans la zone balisée sans une combinaison spécifique pour ne laisser aucune autre trace.
Les enquêteurs et les experts notent et prennent en photo les indices, les éléments suspects ou encore la présence d’objets suspects. Pour cela ils classent les indices en deux parties : il y a les traces appelées « traces directes », qui correspondent aux éléments qui permettent de retrouver un individu directement (empreintes digitales, ADN, …) et il y a les traces indirectes, qui correspondent aux éléments qui permettent de trouver un individu indirectement (fibres de vêtement, traces de semelles, peintures, phare de voiture arraché …). L’erreur n’est pas permise, car elle peut empêcher la résolution d’une enquête. Toute trace peut être utile (une empreinte de chaussure, une tache de peinture…).
Les enquêteurs recherchent aussi les traces latentes, c’est-à-dire les traces qui ne sont pas visibles directement. Ils utilisent par exemple des lampes placées au ras du sol pour relever des empreintes de pas. 
Ensuite, les enquêteurs vont se concentrer sur la recherche des traces non visibles à l’œil nu et qui nécessitent l’utilisation de produits. Parfois le sang a été lavé par le criminel, mais d’infimes gouttelettes sont encore présentes et peuvent être mises en évidence à l’aide du Bluestar. Une lumière bleue est alors observée si la pièce est plongée dans le noir. Mais contrairement aux films américains, cette chimiluminescence n’est visible que quelques secondes.
Quand tous les indices sont relevés, il faut garder uniquement les traces pertinentes et trier les indices pouvant faire avancer l’enquête.
La rencontre s’est achevée par un échange entre les élèves et le Docteur Raul. Les questions posées ont montré l’intérêt des élèves pour le métier de médecin légiste. Pour exercer ce métier, 10 ans d’études sont nécessaires : 6 ans de médecine, puis 4 ans de spécialisation.
Les professeurs de SVT et de Physique-Chimie et les élèves remercient le Docteur Raul pour le temps qu’il a pu consacrer à cette rencontre.
 
Eliott Borkowski, Benjamin Lutz et Thibault Vogler, élèves de 2de6