Lycée du Haut-Barr

- 67700 Saverne -

Photos 1 : Les élèves des classes de TG1 et THLP, accompagnés de leurs enseignantes Mme Claire Le Van (philosophie) et Mme Laura Cousandier (Physique-Chimie), ont bénéficié d'une sortie à la BNU de Strasbourg pour voir l'exposition "Face au nazisme, le cas alsacien", en présence du préfet de région (re) M. Cyrille Schott, président de la SMLH du Bas-Rhin, de Mme Marie-Laure Jundt, présidente de la SMLH comité Alsace du Nord, de Roland Sinteff, officier supérieur de gendarmerie (re), dans le cadre du projet UNESCO "Persécutions et Résistances".

Le vendredi 09/12/2022, les lycéens des classes de TG1 et THLP ont pu, en raison de leur inscription dans le projet UNESCO « Persécutions et Résistances », bénéficier d’une sortie fort instructive pour mieux comprendre comment l’idéologie nazie s’est imposée en Alsace pendant la Seconde Guerre mondiale, mais aussi comment certains Alsaciens courageux et éclairés, souvent jeunes, ont osé résister à cette doctrine fondée sur le postulat inepte d’une « race supérieure » corrélé à la stratégie du « bouc émissaire » réduisant certaines « catégories » d’êtres humains, comme les Juifs, les Tsiganes, les handicapés, les Slaves, les homosexuels, les opposants politiques…, à n’être considérés que comme des « sous-hommes », ouvrant ainsi la voie à d’infernales déviances persécutoires à leur encontre. 

Photos 2 : Les élèves, les enseignants et les partenaires de la Société des membres de la Légion d’honneur (SMLH 67) sur les marches de la BNU avant la découverte de l’exposition « Face au nazisme, le cas alsacien ».


Ce projet, conçu par Mme Claire Le Van (philosophie) avec l’aide de ses collègues Mme Laura Cousandier (Sciences Physiques), Mme Jana Wegner (Allemand) et M. Thibaud Kueny (professeur stagiaire de philosophie) est mené avec le soutien cordial de la direction de l’établissement, M. Roland Buttner, proviseur, Mme Laurence Jezequel, proviseure-adjointe, et Mme Morgane Montembault, gestionnaire. Ce projet citoyen s’effectue en partenariat avec trois entités, à savoir : 1. la SMLH 67 présidée par M. Cyrille Schott, préfet de région (re), soutenu par M. Charles Haas, président d’honneur, et plus particulièrement avec le comité d’Alsace du Nord présidé par Mme Marie-Laure Jundt, soutenue par M. Roland Sinteff, colonel (re) ; 2. les Archives départementales, grâce à l’archiviste Mme Marie Collin et la chargée de mission pour la citoyenneté, Mme Carine Leveque, 3. le ministère des armées-direction des patrimoines, de la mémoire et des archives.

Photo 3 : M. Cyrille Schott présentant un exposé aux élèves lors du trajet en bus, notamment en expliquant la devise « Ein Volk, ein Reich, ein Führer ».


Dès le matin, durant le trajet en bus, les élèves ont eu la chance de bénéficier de la présence de trois membres de la SMLH 67, M. Cyrille Schott, Mme Marie-Laure Jundt et M. Roland Sinteff, invités pour accompagner la première partie de cette sortie, à savoir la découverte de l’exposition « Face au nazisme, le cas alsacien » présentée à la BNU de Strasbourg. L’ancien préfet de région a eu la bonté de partager ses connaissances approfondies sur l’histoire de la Seconde Guerre mondiale aux lycéens, en présentant un brillant exposé articulé autour de trois axes inscrits dans la devise du IIIème Reich : 1. Ein Volk, 2. Ein Reich, 3. Ein Führer, puis 4. en évoquant « le cas alsacien ». 

Photo 4 : Affiche de propagande, présentant le slogan du IIIème Reich expliqué par M. Cyrille Schott, se trouvant dans l’exposition sur « L’Alsace face au nazisme, le cas alsacien ».

Le préfet de région à la retraite a tout d’abord insisté sur les dangers d’une idéologie fondée sur la notion de race qui entre en rupture avec l’universalisme humaniste. Quand le « Volk » doit être « pur », alors tous ceux qui ne sont pas de la race « supérieure » sont considérés comme des « déchets », dont il faut se débarrasser ! A ces prétentions eugénistes s’ajoutent des prétentions hégémoniques : le peuple « aryen » doit disposer d’un espace vital, d’un « Lebensraum » adapté, ce qui implique des conquêtes territoriales et des annexions. 2. Le « Reich » correspond à un Etat unitaire sous le commandement d’un parti unique, le parti nazi, ne tolérant aucune dissidence ou divergence politique. Ainsi, le camp de Dachau est ouvert dès 1933 pour enfermer les opposants politiques. Il ne s’agit pas d’un Etat pacifiste, mais d’un Reich qui se lance dans une économie de guerre. Ce Reich s’affirme comme le IIIème (1933-1945), après le Saint Empire romain germanique (962-1806) et le Reich de l’empire fédéral (1871-1918), notamment wilhelminien (1871-1890). 3. Le « Führer » est comparable à un « nouveau dieu » qui met en place un véritable culte de sa personnalité grâce à une propagande offensive et répressive. Son Etat totalitaire est fondé sur une logique belliciste qui a mené à des destructions massives tant humaines que matérielles, sans parler de l’horreur de la Shoah. 4. L’Alsace est annexée dès 1940, il s’agit d’une « annexion de fait », au prétexte que ce territoire faisait déjà partie du IIème empire et donc reviendrait de droit au IIIème empire. Le Gauleiter Wagner est nommé, et une germanisation forcée est mise en place. Dès août 1942 ont lieu des incorporations de force de jeunes gens devant devenir « malgré eux » des soldats allemands. On dénombre 130 000 Malgré nous, dont un tiers sont morts sur le Front de l’Est. Le terrible camp de concentration de Natzweiler-Struthof est ouvert, ainsi que le camp de redressement de Schirmeck. Si des Alsaciens se rallient au régime nazi et se compromettent, l’Alsace est aussi une terre de résistance, grâce notamment à des jeunes, au nombre desquels compte Marcel Weinum du réseau de la Main noire.  L’Université de Strasbourg est évacuée et se replie à Clermont-Ferrand. La Reichsuniversität pratique des expérimentations sur des détenus du Struthof. Après cet exposé remarquable, et bien plus exhaustif, mais dont nous ne pouvons présenter ici qu’un résumé, un temps de questions-réponses avec les jeunes a eu lieu. Le mot de conclusion, suite à une précision de M. Roland Sinteff, a porté sur la nécessité d’avoir « une boussole de valeurs supérieures » pour faire les bons choix dans des périodes de barbarie, car le Droit et la Raison ordinaires ne sont pas des sauvegardes toujours suffisantes face à des idéologies qui précisément, procèdent à des inversions des valeurs et pervertissent les repères tant juridiques que rationnels.

Photo 5 : Les élèves découvrent l’exposition grâce à une visite guidée stimulante.

Les élèves ont ensuite bénéficié d’une visite guidée de l’exposition qui les a aidés à compléter leur dossier pédagogique (la version élèves), afin qu’ils puissent garder en mémoire toutes les informations transmises. La guide a notamment insisté sur la façon dont l’idéologie nazie cherchait à définir la pureté de la race en recourant à des arbres généalogiques remontant à plusieurs générations. Elle a expliqué les mécanismes de la propagande nazie, évoqué les persécutions des dissidents et l’épuration des Juifs. 

Photo 6 : Une généalogie antisémite monstrueuse : pour être un bon Aryen, il ne fallait pas avoir d’ancêtres juifs jusqu’aux quatre grands-parents ! Dans le doute, la discrimination prévaut !


Pour approfondir l’exposition, lien vers le dossier pédagogique complété. 

M. Cyrille Schott a ensuite proposé aux élèves un exposé intitulé « L’Alsace entre la France et l’Allemagne » en présentant une fresque historique débutant lors de l’empire romain et s’achevant par le retour à la France en 1945, en passant par différentes étapes, notamment l’empire franc, la Lotharingie, la Francie orientale, le Saint Empire, le Traité de Westphalie (1648), le Second empire avec la mise en place du droit local, puis le retour à la France en 1918, et enfin l’annexion allemande de 1940 à 1945. Il a achevé son exposé sur la construction européenne, en mentionnant les grandes figures fondatrices, hommes comme femmes. 

Photos 7 et 8 : L’histoire de l’Alsace expliquée aux jeunes.


Pour remercier les trois membres de la SMLH de leur généreuse disponibilité, l’enseignante de philosophie a préparé des petits sachets de Bredele, offerts par les élèves. Les traditions alsaciennes font entièrement partie de cette identité spécifique résultant de l’histoire ! Les trois membres de la SMLH ont ensuite pris congé de notre groupe.

Photo 9 : Après l’histoire de l’Alsace, des douceurs typiques de cette région lors de l’Avent pour exprimer nos remerciements à nos partenaires pour leur soutien généreux et engagé.


Après un rapide pique-nique des élèves et enseignantes, bien au chaud dans les couloirs de la BNU, suivi d’une grande promenade digestive nous permettant, via un petit détour par la féérie du Marché de Noël de Strasbourg, nous nous sommes rendus tranquillement à pied aux Archives départementales, où nous avons été chaleureusement accueillis par Mme Marie Collin, archiviste, et par sa collègue Mme Carine Leveque, chargée de mission pour la citoyenneté, ainsi que par un stagiaire. L’après-midi a commencé par un temps d’échange dans l’auditorium, où l’archiviste a tout d’abord expliqué les missions qui sont les siennes.

Photos 10 et 11 : Les élèves dans l’auditorium écoutent les explications, puis les consignes de Mme Collin. 


Mme Collin a donné des éclairages sur les ateliers qu’elle a conçus « sur mesure » pour notre projet « Persécutions et Résistances », afin que les élèves puissent travailler à partir de documents d’archive originaux sur différentes figures de résistants alsaciens : une chance extraordinaire que les élèves, comme les enseignantes, ont grandement appréciée !

 

Photos 12 à 16 : Les élèves dans la salle destinée aux chercheurs en train de consulter des dossiers d’archives sur divers résistants. 

Les élèves étaient visiblement émus et très impressionnés d’avoir entre leurs mains des documents authentiques sur des personnes admirables, femmes comme hommes, qui n’ont pas hésité à s’opposer à la barbarie nazie, ce qui leur a valu des réprimandes et sanctions, allant de vexations à l’emprisonnement, voire à la mise à mort, en passant par des procès, la torture, la déportation. Les jeunes, en situation d’apprentis chercheurs, devaient remplir une feuille « d’enquête » pour identifier les personnes, leur parcours, leurs actes de résistance et les conséquences qui en ont découlées pour elles et leur entourage. Parfois, les informations étaient lacunaires ou incohérentes. Certains élèves ont eu en main des dossiers sensibles concernant l’Université de Strasbourg, les « Sondergerichte » (tribunaux d’exception pour les dissidents accusés de trahison), le réseau de la Main noire... Ils ont été particulièrement secoués par la violence des sanctions, avec des exécutions expéditives pour le simple refus d’effectuer le salut « Heil Hitler », et ce, quel que soit l’âge... La brutalité du régime nazi imposé en Alsace dès 1940 est devenue très concrète, le temps de la consultation de ces dossiers. Les élèves ont pu ensuite découvrir les Archives et leur organisation qui semble labyrinthique au premier abord, mais qui est en réalité savamment organisée.

 

Photos 17 à 20 : Mme Collin nous offre une visite guidée des Archives et nous explique les divers métiers qui permettent de conserver ces documents précieux pour l’histoire et la mémoire.


Cette journée restera gravée dans les mémoires des élèves, car la grande Histoire de l’Alsace, expliquée aux élèves par M. Cyrille Schott et par la guide de l’exposition « Face au nazisme : le cas alsacien », s’est vue concrètement illustrée par des histoires singulières de résistants, découverts grâces aux dossiers d’Archives mis à disposition par Mme Marie Collin. Les élèves ont pu ainsi sentir l’aspect vivant de la mémoire, les strates de l’histoire dans ce qu’elles ont d’encore palpable et palpitant. S’il n’y a peut-être pas de leçon à tirer de l’Histoire toujours changeante, il n’en demeure pas moins qu’il y a des leçons humanistes à tirer de toutes les histoires, qui valent comment autant d’incitations à garder des clartés bienveillantes dans ses pensées et à adopter avec courage des positions fidèles à des convictions respectueuses de chacun.e, même dans les périodes les plus sombres comme l’indique la désignation nazie du processus d’anéantissement des ennemis « Nacht und Nebel » (nuit et brouillard). Cette journée thématique avait pour objectif d’inviter les jeunes à devenir des citoyens vigilants et responsables, capables de s’engager pour une démocratie respectueuse de la liberté, de l’égalité et de la fraternité. Un grand merci à tous ceux et toutes celles qui se sont impliqué.e.s dans la réussite de cette journée stimulante !

Article DNA, paru le 14 janvier 2023 : Comprendre comment l'idéologie nazie s'est imposée